1. Introduction

Nous cherchons à répondre à la question:

Comment établir avec certitude un discernement sur ce qu’il convient de penser et de faire?
— Question du cours

dans le cadre particulier de l'intelligence artificielle. Nous voulons dire parler, comment nous préparer à répondre à une telle question, à savoir comment agir de manière éthique? Et nous voulons rendre le cas plus concrêt en l’appliquant à l’intelligence artificielle.

Comment nous préparer à agir de manière éthique face aux futurs enjeux qui seront posés par l’IA?
— Question du cours

Pour pouvoir donc juger du caractére éthique des options qui s’offrent à nous, il faut au préalable savoir ce qu’est l’intelligence artificielle, l’éthique et comment ces notions peuvent s’articuler.

Bref,

Comment définir l’éthique appliquée à l’intelligence artificielle ?
— Question du cours

Et puisque nous voulons commencer par ce qui nous semble le plus connu de nous, nous commençons par qu’est-ce que l’intelligence artificielle?

Une bréve recherche nous informe qu’il s’agit d’un produit d'ingénierie informatique qui a un lien fort avec l'intelligence. Reprenant notre méthode, nous cherchons donc à obtenir de la clarté sur l’ensemble de ces notions, et voir comment elles s’articulent avec la notion d'artificiel pour former la dite intelligence artificielle.

1.1. Qu’est-ce que l’informatique?

1.1.1. Définition

Informatique : le traitement automatique de l’information.
— Définition

L’informatique est une discipline qui traite de l’information, et ce, de manière automatisée. Ce qui signifie que le traitement à appliquer a été determiné par l’homme, et que celui-ci l’a automatisé au moyen d’une plateforme d’automatisation, qu’on appelle ordinateur.

Il est donc manifeste que l’informatique est une discipline pratique, et non spéculative. Son objectif est de produire — de manière automatisée — de l’information. Si l’information est le résultat, l’informatique est le moyen: l'informatique est un art.

Je m’explique.

1.1.2. L’informatique est un art

L’informatique est une discipline qui cherche à fournir des moyens d’automatisation du traitement de l’information, que ce soient des plateformes d’automatisation (ordinateur), ou des artefacts d’automatisation (logiciels). Notez le terme: artefact.

Parmi les activités humaines, on distingue les sciences des arts. Les sciences cherchent à comprendre les choses et les phénomènes par leurs causes propres. Les arts quant à eux cherchent à produire des choses, qu’on nomme artefacts: arte factum, « qui est fait par l’art ».

L’art s’oppose à la nature. Est artificiel, ce qui est fait par l’art, c’est-à-dire par l’activité humaine rationnelle; est naturel ce qui est produit par la nature. La foudre est naturelle, l’éclairage électrique est artificiel.

L’informatique n’est donc pas une discipline purement spéculative comme le sont les mathématiques, mais une discipline pratique : c’est-à-dire n’ayant pas comme objectif la seule compréhension, mais l’automatisation du traitement de l’information. La science y est un moyen, et non une fin.

Sa mise en œuvre nécessite donc d’abord de connaître l’information. L’information in abstracto, ou du moins celle propre à son domaine d’application. Il faut ensuite déterminer le bon traitement devant être appliqué afin de produire le résultat attendu. Et enfin, il faut l’automatiser.

L’informatique est un art.
— Conclusion

1.2. Qu’est-ce que l’ingénierie?

La simple exposition au terme de génie dans les expressions telles que génie civil ou génie logiciel renvoie à la notion de maîtrise, au travail bien fait et méthodique. La maîtrise est le propre du maître: il ne s’agit plus simplement de savoir faire, mais de savoir comment le faire et pourquoi le faire ainsi. Le maître connaît les raisons de son agir [1], et c’est l’une des raisons pour lesquelles il peut l’enseigner.[2]

C’est l’expérience qui engendre l’art, tandis que l’inexpérience ne doit le succès qu’au hasard qui la favorise.
— Aristote
citant Polus
Notez
Le terme d’ingénierie est un néologisme qui s’est substitué — et a quelque peu subverti — celui de génie. On connote de plus en plus un processus industriel et une conception séparée de la phase de réalisation. [3]

L’ingénierie étant un art, relève de l’expérience, de la science et de la technique.

1.2.1. Qu’est-ce que le génie?

À l’origine, le génie désigne l’utilisation de l’art mécanique en vue de construire des engins militaires. Il possède une racine commune avec ingénieur par ingenium « intelligence, talent, habileté, génie, savoir-faire. ».

Aussi l’ingénieur est-il celui qui porte un regard attentif au besoin, aux contraintes, aux méthodes et ressources disponibles. Il analyse et synthétise afin de mettre en œuvre des solutions fonctionnelles et pérennes.

Il convient donc de revenir à la notion d’art. La science cherche simplement à connaître les raisons, l’art à produire. Cependant, l’art partage avec la science le fait de connaître la raison des choses.

Le mot art vient du latin ars qui signifie l’art et la profession en ce qu’ils nécessitent de l’habileté. Les anciens grecs avaient une notion similaire, qu’ils désignaient par le terme τέχνη techne, à laquelle ils ajoutaient la connotation de technique et de charpente. Par charpente, il faut comprendre les structures et donc l’activité d'architecture. L’architecture, c’est la connaissance et la mise en oeuvre des principes structurels qui permettent l’élaboration de solutions opérationnelles et perennes.

Cette unité entre art et artisanat, cette affinité avec la technique et la production est bien rendue par le japonais じゅつ jutsu.

Art : système des enseignements universels, vrais, utiles, partagés par tous, tendant vers une seule et même fin.
— Définition
Galien
Notez
Donald Knuth, écrivit son célèbre Art of computer programming, et non pas Science of computer programming. En cela, il sera suivi par bien d’autres.
Ingénierie : activité allant de la conception à la responsabilité de la construction.
— Définition
Ingénieur : celui qui invente, qui trace et qui conduit des travaux et des ouvrages.
— Définition
Génie : art de l’ingénieur.
— Définition

1.2.2. Le génie et la technique

Il est important pour nous de savoir distinguer — sans séparer — l’activité technique de l’ingénierie. La technique consiste à savoir comment résoudre un problème lorsqu’il est bien défini. L’ingénierie consiste d’abord à savoir déterminer quel est le bon besoin, ses contraintes et les problèmes associés. De là, l’ingénieur propose des options de solutions originales et pérennes capables de mitiger les contraintes et les risques. Ses solutions sont justifiées à partir de l’analyse des besoins, de l'expérience, de l’état de l’art, et surtout de ce qui est disponible.

On peut synthétiser la méthode de l’ingénieur ainsi:

Méthode de l’ingénierie
  1. Recueillir le problème ou le besoin.

  2. Formaliser le besoin et les informations associées.

  3. Définir le traitement à appliquer.

  4. Implémenter la solution en utilisant les moyens adéquats.

Pour l’ingénieur la réalisation est indissociable du savoir : l’ingénierie est une connaissance pratique.

L’ingénieur sait choisir les bons moyens à mettre en œuvre pour obtenir une solution fonctionnelle et pérenne : il sait justifier ses choix.
— Conclusion

Savoir justifier ses choix nécessite une part de discernement. Celui-ci pour discerner doit être capable de découvrir et reconnaitre des aspects théoriques présents dans la réalité.

2. Qu’est-ce que l’intelligence artificielle?

Nous savons depuis au moins Aristote comment il convient de procéder pour determiner ou apprendre ce qu’est une chose. Un des éléments les plus importants de la méthode consiste à comparer ce que l’on cherche à approfondir avec une autre chose relativement semblable, si possible déjà connue. Tout d’abord, on détermine le commun entre ces deux choses, ce qui nous permet d’obtenir le genre (le générique). Ensuite, on détermine les différences, ce qui nous permet d’obtenir l’espèce (le spécifique). Alors, procédons.

2.1. Comparaison à l’informatique

Informatique : le traitement automatique de l’information.
— Définition

Nous savons déjà que l’intelligence artificielle est un domaine de l’informatique. Ce qui signifie que sa définition admet l’ensemble de celle de l’informatique, ce qui est déjà signifié [4] par le terme artificiel.

Il s’agit de determiner ce qu’il y a de spécifique à l’Intelligence Artificielle, et nous pouvons déjà savoir que cela regarde le traitement de l’information. La question donc rebondit: quel est le lien entre intelligence et information? [5]

Une chose est encore à remarquer: on ne parle pas de science artificielle, mais d’intelligence artificielle. Quel commun et quelles différences entre intelligence et science?

2.2. Qu’est-ce qu’une science ?

2.2.1. La science en elle-même

Le mot science vient du latin scio savoir. Son étymologie remonte à la racine indo-européenne skei « couper, diviser ». Vous comprenez maintenant le lien avec la méthode présentée par Aristote: déterminer le commun, séparer le spécifique. Le savoir est cependant un genre, et tout savoir n’est pas une science.

On ne pense jamais connaître une chose que quand on en connaît les causes premières, les principes premiers, et jusqu’à ses éléments.
— Aristote
Physique, Livre 1
Exemple

Je peux bien savoir que l’eau est nécessaire aux plantes, mais je n’en aurai la science que lorsque je connaitrai les mécanismes physiologiques de son absorption et de son utilisation.

Science: connaissance par les causes propres.
— Définition

2.2.2. La science et les sciences

Un même sujet peut être objet de différentes sciences. Le regard du biologiste et du mathématicien ne sont pas les mêmes lorsqu’ils se posent sur un chien.

On dit que chaque science se distingue par sa manière de définir. Je peux avoir un discours scientifique sur la course du chien:

  • en physique: quelles sont les conditions qui permettent les mouvements locaux (gravité, force)?

  • en mathématique: quels sont les rapports de quantités en jeux, l’impact de la géométrie?

  • en biologie: quelles sont les conditions biologiques au mouvement?

Dans chacune de ces questions posées sur le même objet, mais par des sciences différentes, la définition du chien va différer. Il s’agit d' une projection de la réalité totale qu’est un chien dans le formalisme de chaque science. Ce sont différentes formalités, différentes manières de considérer, de « regarder », qu’on appelle point de vue formel.

Chaque science de distingue donc par son point de vue formel.

La science peut avoir pour conséquence d’éclater la réalité dans l’esprit de celui qui la pratique: on retrouve bien là l’origine même de son nom et de sa méthode. Aussi, pour retrouver une vision globale de la réalité, il faudra faire un effort de synthèse, de réconciliation des formalités.

Une conséquence importante est à noter. Si je connais les causes d’une chose, alors je sais comment l’obtenir. Dans l’ordre de la connaissance, c’est la preuve. Dans l’ordre du faire, c’est la production. L’objet de notre activité, est comme la conclusion de l’enchainement des causes, étant donnés des principes de départs ou une situation initiale.

En simplifiant, on peut dire que les causes servent de principes, la logique de méthode et l’objet d’étude de conclusion.

Science: Connaissance des conclusions, et des méthodes pour y parvenir.
— Définition mnémotechnique
La science, en effet, porte sur les conclusions que l’on connaît grâce aux principes.
— Saint Thomas
commentaire de l'Ethique à Nicomaque.

La science est formelle.

Formalisme : langage ayant pour objectif de représenter de manière univoque (non-ambiguë) un objet d’étude.
— Définition

Notez encore une fois que l’on parle d’intelligence artificielle et non de science artificielle.

2.3. La réalité de l’intelligence

Le terme intelligence vient du latin inter legere lire. L’intelligence lit à l’intérieur, découvre ce que sont les choses, leurs lois propres de relation aux autres. Son propre est de dépasser les apparences. Legere signifie lire, mais également choisir. On voit que celle-ci a ce double aspect speculatif et pratique dont nous parlions précédemment.

Si l’on se concentre sur la capacité de dépasser les apparences pour lire ce que sont les choses, pour les discossier et les choisir, on obtient la définition même du discernement. Le discernement n’est rien d’autre que l’application pratique de l’intelligence.

D’un point de vue logique, on dira que l’intelligence saisit les notions. Cette saisie admet diverses intensités: ignorance, confusion, clarté. Cette saisie peut être formelle ou non.

Une notion est saisie dans la réalité, exprimée dans un mot, décrite dans une définition, et montrée dans la réalité au travers d’exemples.

C’est en ce sens qu’il faut entendre la définition qui suit, où l’on parle de connaissance saisie dans la réalité, et non une simple mémoire.

Intelligence: connaissance des définitions.
— Définition mnémotechnique

Vous comprenez maintenant pourquoi on parle d’intelligence artificielle et non de science artificielle. C’est donc de l’efficacité de son Traitement du Langage Naturel, que vient la notoriété de ChatGPT.

Dans l'`ordre spéculatif`, l’intelligence consistera en la saisie claire des notions. Dans l'`ordre pratique`, il s’agit du discernement. Celui-ci permet le sain usage du jugement concernant ce que sont les choses, par la saisie claire dans la réalité, qui s’oppose à la confusion. C’est la racine de la prudence: la droite raison dans l’agir. [6]

Comment agir de manière éthique: agir prudemment, i.e. avec méthode, pour obtenir ce qui est éthique dans les circonstances. Qu’est-ce qui est éthique? Quelles sont les circonstances? C’est le rôle du discernement.

2.4. L’intelligence dans l’intelligence artificielle

2.4.1. Les premières tentatives avec Turing

Nous comprenons maintenant que l’intelligence artificielle est une projection de l’objet/activité « intelligence » dans l’art informatique et son formalisme.

Russell [7] et Norvig [8] font remarquer dans leur ouvrage, Artificial Intelligence: A Modern Approach, 4th edition. que: « Les ingénieurs en aéronautique ne définissent pas leurs objectifs comme l’art de faire des machines qui volent exactement comme le ferait un pigeon, et qui pourraient même tromper un pigeon. »

Il s’agit ici d’une critique ouverte à l’encontre d'Alan Turing. Celui-ci avait proposé le célèbre test de Turing. Lors de celui-ci, un homme est engagé dans plusieurs conversations écrites. Il doit alors déterminer parmi les conversations qu’il a eues, celles qui ont eu lieu avec une machine. La machine passe le test de Turing, si l’homme n’a pas réussi à faire le distingo.

Alan Turing est l’un des pères de l’informatique. Nous l’avons vu, l’intelligence des notions admet divers degrés depuis l’ignorance jusqu’à la clarté formelle. Aussi est-il fondamental de remarquer que Russel et Norvig n’auraient pas pu faire cette critique sans le défrichage de Turing. On retrouve l’adage de Bernard de Chartres, (XIIᵉ siècle) « Nous sommes des nains sur les épaules de géants. »

Remarquez que si Turing a pu manquer de clarté dans le domaine qu’il avait pour ainsi dire lui-même inventé, tout comme Russel et Norvig, il maitrise cependant parfaitement l’ingénierie. Tous répondent à la question de ce que serait une intelligence artificielle, non pas de de manière purement spéculative, mais par la définition de résultats à obtenir de manière automatisée.

L’ingénierie ne répond pas aux questions de manière purement spéculative, mais par la définition de résultats à obtenir de manière automatisée.
— Conclusion
Notez
C’est donc un manque de discernement que de faire porter à l’ingénierie l’idée de produire une conscience.

Remarquez encore la profondeur du regard de Turing: en posant l’informatique, il a l’intelligence de la notion: le traitement de l’information. Et sa science: il conclu aussitôt de manière ultime: le traitement automatisé de l’information doit aboutir à l’intelligence articifielle.

Une dernière chose. Avez-vous noté que le test proposé par Turing n’a absolument rien d’anodin ou de naif? Il a posé les domaines de l’intelligence artificielle:

  • Traitement du langage naturel

  • Representation des connaissances

  • Raisonnement automatisé

  • Apprentissage automatique

On pourra facilement articuler cela avec la robotique via la vision artificielle et la robotisation.

2.4.2. Quels sont les domaines de l’intelligence artificielle?

Intelligence Artificielle : discipline de l’ingénierie logicielle qui cherche à produire des solutions à des problèmes posés de telle sorte qu’il faudrait qu’un homme fisse preuve d’intelligence pour obtenir un résultat similaire.
— Définition

On classe habituellement les sous-domaines de l’IA comme ceci :

  • Le Traitement du Langage Naturel.

  • L' Apprentissage Automatique ou Machine Learning.

  • L' Apprentissage Profond ou Deep Learning.

Le Traitement du Langage Naturel utilise actuellement de l’apprentissage profond pour traiter et interpréter des données, de type texte ou numérique.

L'Apprentissage Automatique utilise toutes sortes de techniques, très souvent des méthodes statistiques, pour tirer des généralités et des lois à partir de séries de données.

L' Apprentissage Profond est une technique particulière de L' Apprentissage Automatique qui se concentre aujourd’hui sur les réseaux de neurones multi-couches.

2.5. L’Apprentissage Automatique

L’Apprentissage Automatique consiste à tirer des généralités sur une série de données.
— Définition

L’apprentissage Automatique est un genre qui admet au moins trois espèces, qui sont des paradigmes :

  • L' apprentissage supervisé, qui cherche à prédire.

  • L' apprentissage non-supervisé, qui cherche à explorer les corrélations.

  • L' apprentissage par renforcement, qui cherche à determiner la bonne action à réaliser à partir d’experiences essais-resultats, où le résultat fonctionne comme une récompense.

Si vous souhaitez approfondir, vous pouvez consulter les bons articles d’IBM.

Vous trouverez également une initiation pratique complète sur le site scikit-learn.

2.5.1. L’Apprentissage Automatique supervisé

L' apprentissage automatique supervisé consiste à tirer des généralités sur une série de données, afin de pouvoir faire des prédictions sur de futures données inconnues.

Apprentissage Automatique supervisé : apprentissage automatique en vue de prédire.
— Définition

On en distingue deux catégories, en se fondant sur la nature de ce qui est prédit:

  • La prédiction de catégories (valeurs discrètes), appelée classification.

  • La prédiction de grandeurs (valeurs continues), appelée régression.

Ainsi on peut définir mathématiquement l’apprentissage automatique supervisé :

Soit un ensemble de couples (X, Y), où X est un ensemble de valeurs descriptives et Y une caractéristique connue. L’Apprentissage Automatique supervisé cherche à établir un modèle f() tel que Y = f(X), et de telle sorte qu’ayant un nouvel X_inconnu n’appartenant pas à l’ensemble initial, on puisse prédire efficacement Y_inconnu = f(X_inconnu).
— Définition mathématique

2.5.2. L’Apprentissage Automatique non-supervisé

Soit un ensemble de valeurs descriptives X = [x1, x2, x3, x4]. L’Apprentissage Automatique non-supervisé cherchera à établir les corrélations qui existent entre les individus X1…​Xn, et donc à les classer.

L’Apprentissage Automatique non-supervisé cherche à mettre en exergue les similarités, les singularités et les valeurs aberrantes.

Le modèle devra notamment procéder à une réduction du nombre de dimensions, en éliminant par exemple les variables très fortement corrélées. Par exemple si x1 représente le poids, et x2 la masse.

3. Conclusion — Proposition de formalisation

Nous l’avons vu avec Russel et Norvig, le domaine a lentement maturé et s’est formalisé progressivement depuis les années 50.

Une réflexion a alors eu lieu, mettant en vis-à-vis divers disciplines, pour pouvoir proposer une définition de l’intelligence, projetée dans le monde informatique.

Il faut cependant ici apporter une précision, afin de sortir d’une confusion maintenue jusqu’ici. Le terme d’intelligence désigne en fait deux réalités distinctes. Il ya tout d’abord la capacité mentale; on pourrait dire aussi la faculté cognitive: c’est l'aptitude à connaitre. Celle-ci se manifeste au travers de ce que l’on nomme classiquement les trois opérations de l’esprit, à savoir la simple appréhension des notions que l’on nomme aussi intelligence, le jugement et le raisonnement.

Il y a dans la raison humaine des activités distinctes, qui engendrent des comportements (au sens scientifique) variés.

  1. La simple appréhension des notions.

  2. Le jugement, qui identifie ou nie l’identité des notions entre elles.

  3. Le raisonnement, qui produit un jugement en rapprochant par un lien causal des jugements.

Exemple

J’appréhende ce qu’est un chien.
J’appréhende que Médor est un chien.
J’appréhende ce qu’est un carnivore.

Je juge que les chiens sont carnivores.

Puis, on m’apprend (sans que j’en ai l’appréhension) que les carnivores ont un cerveau de type gyrencéphale. Je raisonne:

Les chiens sont carnivores.
Or les carnivores ont un cerveau de type gyrencéphale.
Donc les chiens ont un cerveau de type gyrencéphale.

Je cherche à connaître ce que gyrencéphale signifie, et je juge désormais que:
Les chiens ont un cerveau plissé en sillons.

Avertissement
Vous devez bien voir, que ce même jugement posé par vous-même ou par un vétérinaire aura chez vous et chez lui, en soi le même contenu, la même vérité. Mais la clarté de ce jugement, et la saisie des conséquences seront très différentes. Il faut donc faire très attention lorsqu’on raisonne avec quelqu’un: partager les mêmes mots ne signifie pas partager la même compréhension. On se synchronise, en revenant aux exemples qui fondent les abstractions.

Lorsqu’on raisonne sur des abstractions sans en saisir la réalité, ces abstractions ne sont plus des notions mais des symboles, au sens qu’on leur donnerait en mathématique. Ce qui est extrêmement dangereux lorsqu’on passe en pratique, car n’ayant pas la saisie des notions, le discernement est impossible.

Aristote, le père et « clôtureur » de la logique, définit le raisonnement ou pensée droite comme la méthode de raisonnement irréfutable. Un de ses outils est le syllogisme. [9]

On comprend aisément que l’intelligence artificielle aura une affinité toute particulière avec le raisonnement, parce qu’il est formel.

Notez
Cependant, les LLM ne font aucun raisonnement, donc aucune preuve. En effet, un raisonnement valide montre un lien causal. Mais les LLM font des liens de corrélations.

Pour simuler le jugement, on recourra aux méthodes statistiques pour dégager des lois quantitatives (statistiques). C’est le domaine de l' apprentissage automatique.

Pour à peine simuler la saisie des notions, on recourra aux oracles appelés également labellisation. Cette technique consiste à informer le système du nom des catégories qu’il est capable de déterminer. En effet, par analyse statistique par exemple, il pourrait bien dire que dans les images fournies, il y a deux groupes qui se distinguent clairement. Mais sans oracle, il ne pourra pas dire qu’il sagit de corneilles et d’éléphants.

En résumé, on peut formaliser les activités intellectuelles en informatique ainsi :

  1. L' appréhension des notions Oracle / Labellisation.

  2. Le jugement Apprentissage Automatique et Traitement du Langage Naturel.

  3. Le raisonnement : Raisonnement automatique et Prédiction via Apprentissage Automatique.

Notez
Maintenant que les notions sont saisies, elles deviennent discutables.

4. Le minimum à comprendre et retenir

Comment établir avec certitude un discernement sur ce qu’il convient de penser et de faire?
Comment nous préparer à agir de manière éthique face aux futurs enjeux qui seront posés par l’IA?
Comment définir l’éthique appliquée à l’intelligence artificielle ?
— Question du cours

Vous devez être capable de reproduire ce plan…​

  1. Qu’est-ce que l’intelligence artificielle ?

    1. Qu’est-ce que l’artificiel ?

      1. Qu’est-ce que l’art ?

      2. Qu’est-ce que l’informatique ?

      3. Qu’est-ce que l’ingénierie ?

      4. Qu’est-ce qu’un logiciel ?

    2. Qu’est-ce que l’intelligence ?

      1. Qu’est-ce que l’intelligence (faculté) ?

      2. Qu’est-ce que la science ?

      3. Qu’est-ce que l’intelligence (opération) ?

      4. Qu’est-ce que la sagesse ?

      5. Qu’est-ce que l’intelligence artificielle ?

      6. et de répondre aux questions!

Informatique : le traitement automatique de l’information.
— Définition
Art : système des enseignements universels, vrais, utiles, partagés par tous, tendant vers une seule et même fin.
— Définition
Galien
Ingénierie : activité allant de la conception à la responsabilité de la construction.
— Définition
Science: connaissance par les causes propres.
— Définition

Il faut comprendre ce qu’est un point de vue formel.

Formalisme : langage ayant pour objectif de représenter de manière univoque (non-ambiguë) un objet d’étude.
— Définition
Science: Connaissance des conclusions, et des méthodes pour y parvenir.
— Définition mnémotechnique

Si je connais les causes d’une chose, alors je sais comment l’obtenir. Dans l’ordre de la connaissance, c’est la preuve. Dans l’ordre du faire, c’est la production.

Intelligence: connaissance des définitions.
— Définition mnémotechnique

Le discernement n’est rien d’autre que l’application pratique de l’intelligence.

Une notion est saisie dans la réalité, exprimée dans un mot, décrite dans une définition, et montrée dans la réalité au travers d’exemples.

l’intelligence artificielle est une projection de l’objet/activité « intelligence » dans l’art informatique et son formalisme.

Russell [10] et Norvig [11] font remarquer dans leur ouvrage, Artificial Intelligence: A Modern Approach, 4th edition. que: « Les ingénieurs en aéronautique ne définissent pas leurs objectifs comme l’art de faire des machines qui volent exactement comme le ferait un pigeon, et qui pourraient même tromper un pigeon. »

L’ingénierie ne répond pas aux questions de manière purement spéculative, mais par la définition de résultats à obtenir de manière automatisée.
— Conclusion

les domaines de l’intelligence artificielle:

  • Traitement du langage naturel

  • Representation des connaissances

  • Raisonnement automatisé

  • Apprentissage automatique

On pourra facilement articuler cela avec la robotique via la vision artificielle et la robotisation.

Les trois opérations de l’esprit:

  1. La simple appréhension des notions.

  2. Le jugement, qui identifie ou nie l’identité des notions entre elles.

  3. Le raisonnement, qui produit un jugement en rapprochant par un lien causal des jugements.

Comprendre la différence entre notion et symbole.

Comprendre qu’un raisonnement valide montre un lien causal, alors que les LLM font des liens de corrélations.

Intelligence Artificielle : discipline de l’ingénierie logicielle qui cherche à produire des solutions à des problèmes posés de telle sorte qu’il faudrait qu’un homme fisse preuve d’intelligence pour obtenir un résultat similaire.
— Définition
L’Apprentissage Automatique consiste à tirer des généralités sur une série de données.
— Définition
  1. L' appréhension des notions Oracle / Labellisation.

  2. Le jugement Apprentissage Automatique et Traitement du Langage Naturel.

  3. Le raisonnement : Raisonnement automatique et Prédiction via Apprentissage Automatique.

Pourquoi parle-t-on d’intelligence artificielle et non de science artificielle? (il y a plusieurs réponses possibles).


1. Aristote, Où il est question de l’acquisition de l’art: Chapitre 1 seulement.
2. Qu’est-ce qu’un maître? Article.
3. Tolkien, Le Seigneur des Anneaux. « Je crois comprendre à présent ses desseins. Il complote pour devenir une Puissance. Il a un esprit de métal et de rouages ; et il ne se soucie pas des choses qui poussent, sauf dans la mesure où elles lui servent sur le moment. Et il est clair maintenant que c’est un traître noir. »
4. Ne confondez pas signe et preuve. Il y a des signes qui peuvent être des preuves, et d’autres de simples indices.
5. Pour avoir les idées encore plus claires et acquérir une expertise, il faudrait encore chercher le lien entre art et information.
6. Philippe Le Bel, « Nous qui voulons toujours raison garder. »
7. Stuart Jonathan Russell, Lauréat du prix de l’AAAI (Association for the Advancement of Artificial Intelligence)
8. Peter Norvig, Directeur de recherche chez Google, spécialiste de l’IA.
9. Russel et Norvig présentent Aristote comme le premier a avoir fait de l’intelligence artificielle. Sans nier le lien lointain, je pense qu’il y a une mauvaise compréhension (simulée?) du texte d’Aristote. On prend pour univoque ce qui est présenté comme analogique. Aussi l’attribution mécanique que les auteurs font est, selon moi, totalement en dehors de la pensée du maître.
10. Stuart Jonathan Russell, Lauréat du prix de l’AAAI (Association for the Advancement of Artificial Intelligence)
11. Peter Norvig, Directeur de recherche chez Google, spécialiste de l’IA.